Secteur(s) :
19-A-09
relatif aux tarifs des professions réglementées du droit en outre-mer
AvisMise en ligne le : 11 avril 2019
relatif à un projet de décret modifiant certaines dispositions de la partie réglementaire du code de commerce
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Communiqué de presse
En application de l’article L. 444-7 du code de commerce, l’Autorité de la concurrence a été saisie le 17 janvier 2020 par le ministre de l’économie et des finances d’une demande d’avis relative à un projet de décret en Conseil d’État visant à modifier certaines dispositions de la partie réglementaire du code de commerce concernant la fixation des tarifs réglementés de certaines professions juridiques.
Depuis l’adoption de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 (« loi Macron »), les principes de détermination des tarifs doivent tenir compte des « coûts pertinents du service rendu et une rémunération raisonnable, définie sur la base de critères objectifs » (article L. 444-2 du code de commerce). Le gouvernement avait fait le choix, dans le décret n° 2016-230 du 26 février 2016, de retenir une approche « acte par acte » pour la fixation des tarifs des professionnels concernés, visant à fixer les tarifs sur la base des coûts effectivement supportés par les professionnels pour chaque acte réalisé. Cette méthode s’est révélée impraticable faute de disposer d’une comptabilité analytique permettant d’évaluer les coûts pertinents à un tel niveau de précision. Dans ce contexte, la loi n° 2019-222 du
23 mars 2019 a finalement substitué à cette première approche une méthode fondée sur la rentabilité globale des professions concernées, devant permettre aux professionnels de couvrir l’ensemble des coûts supportés et de dégager une rémunération raisonnable au titre de leur « activité régulée ». Pour ce faire, l’article L. 444-2, dans sa rédaction issue de l’article 20 de la loi du 23 mars 2019, dispose que les tarifs sont fixés « sur la base d’un objectif de taux de résultat moyen, dont les modalités de détermination sont définies par décret en Conseil d’État ».
Ainsi, le projet de décret soumis à l’examen de l’Autorité tire les conséquences des précisions apportées par la loi en fixant les tarifs sur la base d’un objectif de taux de résultat estimé globalement et pour chaque profession. Il propose pour cela une réécriture de la méthode de fixation desdits tarifs, en précisant les modalités d’évaluation des coûts pertinents et de la rémunération raisonnable, cette dernière étant, en particulier, définie par référence à un objectif de taux de résultat, lui-même déterminé « à partir d’un taux de référence, déterminé par arrêté ».
Par ailleurs, le projet de décret modifie le système des remises à taux fixe et identiques pour tous de droit commun, dont le taux maximal, actuellement plafonné à 10 % sur les tranches d’assiette supérieures à 150 000 euros, devrait prochainement passer à 20 %. Alors que la loi y a adjoint un dispositif de libre négociabilité des remises entre le notaire et son client pour certaines prestations et au-delà d’un certain seuil d’émoluments, le projet maintient les remises au taux majoré (plafonné à 40 % sur les tranches d’assiette supérieure à 10 millions d’euros) pour une liste limitative de prestations. Ce dispositif des remises à 40 % avait été présenté, lorsqu’il a été mis en place en 2016, comme visant à pallier l’absence de libre négociabilité des remises. Le projet de décret propose, enfin, de rationaliser la fixation des majorations tarifaires outre-mer, en prévoyant un « rapprochement » entre le taux de résultat moyen constaté pour les professionnels installés en outre-mer et l’objectif de taux de résultat fixé nationalement.
Après un examen approfondi de ce projet de décret, l’Autorité émet un avis réservé sur les dispositions de son article 3, qui confèrent aux ministres signataires des arrêtés une marge d’appréciation trop importante dans la fixation des tarifs pour être compatible avec l’exigence légale d’une définition de la rémunération raisonnable « sur la base de critères objectifs ».
L’Autorité propose ainsi des aménagements rédactionnels visant à préciser les modalités de détermination et de révision de l’objectif de taux de résultat moyen d’une part, et la méthode d’évaluation des coûts pertinents et de la rémunération raisonnable d’autre part.
Par ailleurs, elle invite le gouvernement à préciser la nature et l’origine des données comptables prises en compte dans l’estimation des différents agrégats utilisés dans la méthode de fixation des tarifs et à préciser le concept de « rapprochement » du taux de résultat moyen des professionnels installés en outre-mer de l’objectif fixé nationalement en explicitant, dans le projet de décret, la finalité des majorations applicables localement : compenser les surcoûts réels supportés en outre-mer.
Concernant les modifications apportées à l’encadrement règlementaire des remises, l’Autorité se félicite du rehaussement du taux plafond, de 10 % à 20 %, pour les remises de droit commun. Comme elle l’a déjà indiqué, elle estime que le seuil de déclenchement de cette faculté de remise, actuellement fixé pour les notaires à 150 000 euros d’assiette, devrait être abaissé à 75 000 euros d’assiette pour intensifier la concurrence par les prix dans un secteur qui en a longtemps été privé.
Enfin, si l’Autorité se félicite de la réintroduction, prévue par la loi, de la libre négociabilité des remises entre le notaire et son client au-delà d’un seuil d’émoluments, elle regrette qu’il soit envisagé de restreindre le champ d’application de cette mesure par voie règlementaire : en fixant ce seuil de déclenchement à 200 000 euros d’émoluments (alors que ce seuil était fixé à 80 000 euros dans l’ancien décret de 1978), les dispositions envisagées pourraient, paradoxalement, conduire à une situation moins concurrentielle en 2020 que celle qui prévalait avant la réforme. De ce même point de vue, le maintien du dispositif des remises à 40 %, qui prive de facto les usagers des prestations concernées du bénéfice de la remise de droit commun sur les tranches d’assiette comprises entre
150 000 euros et 10 millions d’euros, pour les réserver aux rares cas d’assiettes extrêmement élevées, apparaît peu compatible avec l’impératif d’équité sociale poursuivi par le législateur de 2015.
Ce résumé a un caractère strictement informatif. Seul fait foi le texte de l'avis.
Origine de la saisine | Ministre de l'économie et des finances |
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