Dans le cadre de la remise à plat du cadre réglementaire applicable à Canal +, l'Autorité ouvre aujourd'hui une consultation publique.
Cette consultation a pour objectif de décider s’il convient de lever, d’adapter ou de renouveler pour les 5 ans à venir les obligations pesant sur l’opérateur depuis 2012.
En juillet 2012, l’Autorité de la concurrence a, à nouveau1, autorisé le rachat de TPS par Groupe Canal Plus (GCP) en conditionnant sa décision au respect de 33 injonctions2. Elle avait par ailleurs autorisé la prise de contrôle par GCP des chaînes D8 et D173, sous réserve du respect de 7 engagements4.
Ces mesures, prises pour 5 ans (jusqu’au 23 juillet 2017) peuvent être renouvelées pour 5 ans supplémentaires (2017-2022) si les circonstances le justifient. C’est dans ce cadre que l’Autorité procède à une nouvelle analyse concurrentielle des marchés concernés.
Afin de l’éclairer sur le paysage concurrentiel prévalant aujourd’hui dans les secteurs de la télévision payante et gratuite, elle appelle les acteurs intéressés à se prononcer sur l’opportunité de lever, d’adapter ou de renouveler ces mesures. Les contributions à la consultation publique sont à adresser à l’Autorité avant le 30 septembre 2016. Elle rendra sa décision au plus tard le 23 juin 2017.
Les objectifs poursuivis et les obligations imposées par la décision autorisant le rachat de TPS
Les mesures imposées à GCP dans le cadre du rachat de TPS avaient 3 objectifs :
1. favoriser la diversité des acteurs du secteur (distributeurs, chaînes indépendantes) ;
2. préserver l’avenir concurrentiel des nouveaux espaces économiques issus des modes de consommation émergents (vidéo à la demande par abonnement) ;
3. préserver les équilibres du système de financement du cinéma français.
Afin d’éviter la préemption des meilleurs contenus par GCP, ses comportements d’achat ont été strictement encadrés :
- limitation de la durée des contrats conclus entre GCP et les studios américains et producteurs français et encadrement de leurs conditions ;
- cession des droits d’exploitation à la demande des films du catalogue de Studio Canal à tout opérateur intéressé ;
- présence de GCP au sein d’OCS, son concurrent direct, via un mandataire indépendant.
Sur le marché intermédiaire de l’édition et de la commercialisation de chaînes de télévision payante et sur le marché aval de la distribution de services de télévision payante, l’Autorité a défini des mesures garantissant des règles du jeu claires pour l’accès des chaînes indépendantes à une distribution sur CanalSat et garantissant une mise en concurrence effective sur le marché aval :
- reprise d’une proportion minimale de chaînes indépendantes ;
- offres de référence assurant aux chaînes des conditions de reprise techniques, commerciales et tarifaires transparentes, objectives et non discriminatoires ;
- reprise de toute chaîne détenant des droits premium de façon non exclusive ;
- encadrement des conditions d’achat des droits de diffusion par GCP afin de permettre aux distributeurs alternatifs, notamment les fournisseurs d’accès à internet (« FAI »), de concurrencer de manière effective les exclusivités de distribution sur CanalSat ;
- mise à disposition des distributeurs tiers de toutes les chaînes cinéma éditées par GCP (chaînes Ciné +) pour son bouquet CanalSat (« dégroupage ») ;
- interdiction de contrat prévoyant la présence exclusive ou privilégiée de ses offres à la demande sur les plateformes des FAI.
Enfin, concernant les départements et régions d’Outre-Mer, une injonction générale interdit à GCP de conclure pour les territoires ultramarins des contrats spécifiques contenant des dispositions moins favorables pour les distributeurs que ceux conclus pour la métropole.
Les engagements pris par GCP lors du rachat de D8 et D17
Pour la télévision gratuite, GCP a souscrit des engagements plafonnant le nombre de contrats cadre qu’il peut détenir avec les studios américains comme le nombre de films français récents lui permettant de cumuler des droits de diffusion en télévision gratuite et payante. GCP s’est aussi engagé à limiter les acquisitions de films français de catalogue auprès de Studio Canal pour une diffusion sur D8 ou D17.
En matière de programmes sportifs qualifiés d’« évènements d’importance majeure », au sens de la réglementation applicable, dont GCP détiendrait les droits, leur commercialisation aux chaînes gratuites doit se faire par un processus de mise en concurrence objectif, transparent et non-discriminatoire.
Enfin, GCP s’est engagé à négocier de façon séparée les acquisitions de droits de diffusion en clair des droits de diffusion en payant et sans pratiquer de couplage, sous réserve des exceptions expressément prévues dans les engagements.
Les questions que pose l’Autorité
La décision de l’Autorité sur le renouvellement de l’ensemble de ces obligations nécessite de mener une nouvelle analyse concurrentielle. L’Autorité doit être éclairée sur les circonstances de droit ou de fait qui justifieraient la levée, la modification ou le maintien des mesures adoptées en 20125.
AFIN DE FAIRE LE BILAN DE L’APPLICATION DES MESURES ADOPTÉES ET DES ÉVOLUTIONS DU SECTEUR, L’AUTORITÉ SOUHAITE APPROFONDIR LES SUJETS SUIVANTS. L’arrivée de nouveaux concurrents justifie-t-elle une levée ou une adaptation des mesures prises en 2012 ? L’Autorité s’interroge sur l’impact concurrentiel de l’entrée de nouveaux acteurs de la télévision linéaire (comme SFR Sport) ou non linéaire (comme Netflix), dont elle devra examiner la position aussi bien sur les marchés de l’acquisition de droits de diffusion qu’à l’aval, sur les marchés de distribution de services de télévision payante. L’Autorité analysera dans quelle mesure l’émergence de nouveaux usages, comme l’accès aux chaînes de télévision au moyen d’une simple connexion internet (offres dites « over-the-top ») modifie le fonctionnement concurrentiel des marchés.
Doit-on distinguer au sein des offres de télévision des FAI les offres de base et celles de second niveau ? L’Autorité examinera également s’il reste pertinent pour l’analyse concurrentielle de distinguer les offres de télévision proposées par certains FAI dans l’abonnement triple-play de base de celles qui nécessitent le paiement d’un abonnement supplémentaire (dites « de second niveau de service »).
De nouveaux contenus méritent-ils d’être considérés comme premium aujourd’hui ? Elle analysera par ailleurs l’évolution éventuelle des contours des programmes dits « premium », c’est-à-dire susceptibles de motiver une décision d’abonnement, tant en matière de sport que de films et fictions (quelle est la place des séries par exemple).
Quel impact l’appartenance de D8 et D17 à GCP peut-elle avoir sur leurs achats de contenus et leurs audiences ? Enfin, l’Autorité examinera l’impact de l’adossement à GCP des chaînes D8 et D17, renommées maintenant C8 et CStar, sur leur pouvoir d’achat de contenus ainsi que sur leurs audiences et positions sur le marché de la publicité télévisuelle.
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La consultation est ouverte jusqu’au 30 septembre
Pour ce faire, l’Autorité recueillera les informations nécessaires auprès des acteurs du secteur. La présente consultation publique a pour objectif de permettre à tout acteur intéressé de se prononcer sur la nécessité du renouvellement des obligations qui pèsent sur GCP, sur le bilan de leur application, sur l’état actuel de la concurrence et sur les évolutions de marché.
Les autres éléments du calendrier prévu
Des questionnaires ciblés seront également envoyés aux principaux acteurs (distributeurs de télévision, détenteurs de droits, éditeurs de chaînes), qui seront auditionnés par les services d’instruction dans les prochains mois.
L’Autorité recueillera également l’avis du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) et de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep), dont l’expertise permettra d’éclairer les évolutions qu’ont connus les différents marchés de la télévision et des télécommunications, comme leur portée concurrentielle.
Enfin, à l’issue d’échanges contradictoires avec GCP, l’Autorité adoptera sa décision, au plus tard le 23 juin 2017.
1En septembre 2011, l’Autorité avait retiré à GCP l’autorisation de racheter TPS pour ne pas avoir respecté plusieurs engagements. Voir communiqué du 21 septembre 2011 et décision 11-D-12
2Voir communiqué de presse du 23 juillet 2012 et décision 12-DCC-100 du 23 juillet 2012.
3Appelées à l’époque Direct 8 et Direct Star et renommées prochainement C8 et CStar.
4Décision 14-DCC-50 du 2 avril 2014 et communiqué de presse, renforçant les engagements souscrits adoptée après annulation par le Conseil d’Etat de la décision initiale 12-DCC-101 du 23 juillet 2012 (voir communiqué de presse).
5Dans leur rédaction adoptée le 2 avril 2014 dans la décision 14-DCC-50 pour ce qui concerne l’opération Canal Plus/D8.
> Consulter le document de consultation publique