Faut-il étendre la loi Lang au livre numérique ? L'Autorité estime qu'une observation de ce marché encore naissant est un préalable souhaitable
Le ministre de la culture et de la communication a saisi pour avis l’Autorité de la concurrence au sujet des différents dispositifs susceptibles de permettre la mise en place d’un système de prix unique pour le livre numérique, à l’instar du système existant avec la loi Lang de 1981 pour le livre imprimé.
Au regard du caractère encore embryonnaire du marché du livre numérique, l’Autorité est d’avis qu’il serait prématuré de mettre en place un cadre qui pourrait se révéler trop rigide ou rapidement obsolète et qui risquerait au final de ralentir le développement du marché.
Les objectifs du prix unique pour le livre imprimé ne sont pas entièrement transposables au livre numérique
Trois objectifs avaient présidé à l’adoption de la loi du 10 août 1981, dite loi Lang, qui consiste à ce que chaque livre papier ait un prix fixé par l’éditeur : l’égalité des citoyens devant le livre, le maintien d’un réseau très dense de distribution et le soutien au pluralisme dans la création et l’édition. Compte tenu des caractéristiques propres au livre numérique, ces desseins ne semblent pas être entièrement transposables. D’une part, la densité du réseau de libraires sur le territoire ne paraît pas pouvoir constituer un facteur d’accessibilité des consommateurs au livre numérique, celui-ci ayant vocation à être mis à disposition en ligne. D’autre part, la diversité de la création et sa mise en avant auprès du public paraissent pouvoir être naturellement favorisées dans un monde numérique, pour au moins deux raisons : la diminution du coût d’édition, de traduction et de diffusion des ouvrages et le phénomène de « longue traîne », qui favorise la coexistence d’un nombre considérable de références et parfois l’émergence de marchés de niche.
Le marché aujourd’hui embryonnaire doit se développer avant l’adoption de toute réglementation
S’il peut être légitime de chercher à limiter les risques de préemption du marché par un ou plusieurs opérateurs pionniers - qui peuvent avoir tendance à concentrer leur activité sur des ouvrages grand public au détriment de livres plus confidentiels - les premiers développements du marché laissent présager que ce risque est faible. C’est pourquoi l’Autorité de la concurrence recommande qu’une période d’observation soit respectée, durant laquelle aucun dispositif spécifique ne serait défini pour le livre numérique et où différents modèles pourraient cohabiter (fixation des prix par le détaillant ou par l’éditeur, système technique ouvert ou fermé de téléchargement du livre). Une période d’un à deux ans permettrait d’évaluer les différents modèles et de bénéficier, au terme de cette phase d’observation, de retours d’expérience pour envisager la suite.
Différents modèles contractuels peuvent être explorés
Dans son avis, l’Autorité explore plusieurs modèles contractuels qui pourraient régir les relations entre éditeurs et détaillants (contrat de mandat, contrat de courtier) et évalue leur compatibilité avec les règles de concurrence.