Réseaux de soins des complémentaires santé : l'Autorité de la concurrence précise les conditions dans lesquelles leur développement peut être favorable à la concurrence et aux patients
L’Autorité de la concurrence précise les conditions dans lesquelles le développement des réseaux de professions de santé agréés peut être favorable à la concurrence et aux intérêts des patients.
Saisie par la ministre de l’Economie, de l’Industrie et de l’Emploi d’une demande d’avis sur les risques et bénéfices éventuels sur la concurrence du développement de réseaux de soins agréés par les organismes complémentaires d’assurance maladie (OCAM), l’Autorité de la concurrence rend aujourd’hui son avis et le publie sur son site internet www.autoritedelaconcurrence.fr.
Des partenariats de plus en plus nombreux entre les OCAM et les professionnels de santé
A l’heure actuelle, de nombreux OCAM ont mis en place des partenariats - directement ou par l’intermédiaire de sociétés tierces qui agissent en qualité de plateformes (comme Santéclair pour AGF ou Itélis pour Axa) - avec les professionnels de santé.
Ces partenariats reposent sur la combinaison d’engagements réciproques en ce qui concerne les prestations non soumises à régulation tarifaire :
- les professionnels de santé agréés s’engagent à fournir un certain niveau de qualité des services rendus aux assurés, à mettre en place le tiers payant et à respecter une certaine modération tarifaire ;
- en contrepartie, les assurés de l’OCAM concerné sont orientés vers les professionnels de santé membres du réseau, ce qui leur assure un flux de clientèle régulier.
Le nombre de professionnels de santé concernés varie selon les réseaux et la profession exercée. À titre d’exemple, la MGEN compte 1 600 opticiens affiliés (sur un total d’environ 11 000) et 25 600 dentistes (sur un total d’environ 36 000 exerçant à titre libéral). Santéclair regroupe environ 1 350 opticiens affiliés, 3 200 dentistes, 600 pharmaciens (sur un total de 28 000 pharmaciens titulaires) et une centaine d’audioprothésistes (sur un total d’environ 2 250 dont 824 libéraux). Itélis compte à ce jour environ 1 500 opticiens et 3 300 dentistes et a conclu des accords avec 3 enseignes d’audioprothésistes. Groupama recense près de 1 500 opticiens et 3 500 chirurgiens-dentistes.
L’Autorité n’est pas hostile au principe de numérus clausus pour l’accès à ces réseaux mais elle préconise l’application de critères d’admission transparents, objectifs et non discriminatoires
Il existe deux types de réseaux : les réseaux ouverts et les réseaux fermés. Les réseaux ouverts accueillent tout professionnel de santé demandeur auprès des OCAM et remplissant les conditions définies conventionnellement (tarifs, qualité et gamme des produits, etc.). Les réseaux dits « fermés » limitent l’accès au réseau à un nombre limité de professionnels par zone géographique (numerus clausus). Les seuls réseaux fermés existant actuellement sont les réseaux d’opticiens, lesquels sont en compétition serrée pour intégrer les réseaux existants.
Les conventions passées avec les gestionnaires de réseaux sont susceptibles de constituer le support de pratiques ayant pour objet ou pour effet d’exclure certains professionnels du marché. Aussi, l’Autorité de la concurrence considère qu’il est nécessaire d’observer une vigilance accrue quant aux garanties permettant de vérifier que le processus de sélection des professionnels de santé repose sur une concurrence par les mérites. Par ailleurs, l’Autorité considère que la durée des conventionnements devrait être limitée [trois ou quatre années] afin d’assurer une fluidité suffisante du marché. Elle recommande aussi que les conditions d’accès des professionnels de santé nouvellement installés soient clarifiées.
Si le risque d’homogénéisation des tarifs pratiqués au sein d’un même réseau ne peut être exclu, le développement de réseaux de professionnels de santé agréés par les OCAM apparaît comme plutôt pro-concurrentiel
Les marchés des soins dentaires et de l’optique se distinguent par une forte asymétrie d’information en défaveur des consommateurs, renforcée par l’interposition du mécanisme assurantiel. En effet, celui-ci conduit parfois, en particulier dans le cadre de remboursements complémentaires significatifs, à une relative indifférence de l’assuré aux prix pratiqués, ainsi qu’à une convergence entre les tarifs pratiqués par les professionnels et le montant maximal des garanties accordées par les OCAM. Par ricochet, une augmentation du niveau des primes d’assurance complémentaire peut en découler.
La mise en place de réseaux de professionnels agréés est précisément de nature à perturber positivement ce schéma. Axée, de fait, sur la régulation de l’offre, et reposant sur une identité d’intérêts entre l’organisme complémentaire – qui cherche à mieux maîtriser ses coûts – et les assurés – qui souhaitent bénéficier d’un reste à charge nul ou limité et d’une prime d’assurance la moins élevée possible –, elle soumet les professionnels souhaitant être sélectionnés à l’obligation de respecter des engagements de modération tarifaire. Ainsi, à supposer qu’il y ait uniformisation des tarifs, il y a toute probabilité qu’il s’agisse, d’une uniformisation à un niveau sensiblement moindre qu’en l’absence de tout mécanisme de contractualisation.
En outre, le développement du conventionnement est susceptible d’engendrer un fonctionnement plus concurrentiel du marché dans la mesure où les professionnels non conventionnés par les OCAM seront incités à offrir soit des services supplémentaires (telles que des conditions de paiement différé), soit une qualité de services supérieure ou encore des tarifs attractifs, pour continuer à attirer des assurés.