Le Conseil de la concurrence sanctionne les majors de l'intérim en France pour s'être concertés sur leur politique commerciale
Le Conseil de la concurrence sanctionne les majors de l’intérim en France pour s’être concertés sur leur politique commerciale à l’égard de leurs clients les plus importants.
Le Conseil de la concurrence vient de sanctionner Adecco, Manpower et VediorBis pour s’être entendus, entre mars 2003 et novembre 2004, afin de limiter la compétition entre eux vis-à-vis de leurs clients importants. Le Conseil avait été saisi par le ministre de l’économie à la suite d’une plainte déposée devant la Commission européenne, qui avait transmis le dossier aux autorités françaises.
Les entreprises en cause se consultaient à une large échelle pour coordonner leur politique commerciale vis à vis de leurs clients « grands comptes »
Adecco, Manpower et Vedior, les trois leaders mondiaux, couvrent 70 % du marché français et répondent à 90 % de la demande des « grands comptes » (entreprises faisant appel de manière régulière et importante à l’interim).
A la suite de perquisitions menées en 2004 et d’une instruction approfondie, le Conseil a réuni des preuves que les entreprises en cause, afin d’atténuer significativement la concurrence entre elles, se coordonnaient fréquemment sur les différents éléments de leur politique commerciale et tarifaire vis-à-vis de leurs clients « grands comptes », tels que Eiffage, La Poste, Alstom, EDF, Servair, les Galeries Lafayette ou Alcan. Selon les cas, elles échangeaient des informations - par exemple sur les coefficients de facturation appliqués aux salaires des intérimaires, sur les remises de fin d’année ou encore sur le niveau des rétrocessions aux entreprises utilisatrices des allègements de charges décidés à l’époque (allègements Fillon) – voire discutaient du montant de leurs offres. Le but de la concertation était de faire en sorte que la compétition par les prix joue le moins possible entre elles.
Le surcoût pour les entreprises utilisatrices et les conséquences sur l’emploi intérimaire se chiffrent à plusieurs dizaines de millions d’euros
Les entreprises utilisatrices de travail temporaire ont été affectées par ces pratiques puisque Adecco, Manpower et VediorBis ont pu se réserver des marges supérieures à celles qui auraient résulté du libre jeu de la concurrence. Les travailleurs intérimaires ont également souffert de la pratique en raison du renchérissement du recours à cette forme de travail.
Par ailleurs, le Conseil a souligné que la pratique ayant consisté, pour les entreprises en cause, à confisquer à leur profit une partie des allègements de charges sociales (allègements Fillon) en limitant leur rétrocession aux entreprises utilisatrices est particulièrement grave. Perturber les effets incitatifs des politiques de l’emploi peut avoir, au-delà de l’impact direct sur le marché du travail, un impact budgétaire négatif et être contre-productif dans un contexte de lutte contre le chômage et de priorité accordée à la croissance économique.
Les sanctions prononcées tiennent compte de la réitération, par les entreprises, de pratiques anticoncurrentielles déjà sanctionnées par le passé
Les entreprises en cause avaient déjà été condamnées en 1997 pour avoir participé à une entente visant à limiter les hausses salariales dans le secteur du BTP en Isère et en Savoie à l’occasion de la préparation des JO d’Albertville : le Conseil en a tenu compte pour fixer les sanctions.
Des engagements d’envergure pris par Adecco, Adia et VediorBis
Adecco, Adia et VediorBis n’ont pas contesté les faits et pris pour l’avenir des engagements d’envergure qui, au-delà de l’élaboration d’un programme de sensibilisation et de formation professionnelle et de la mise en place d’un système d’alerte professionnelle interne, visent à améliorer le fonctionnement concurrentiel du marché. Elles ont à ce titre bénéficié d’une réduction de leur sanction.
Le montant total des sanctions s’élève à 94,4 millions d’euros et se répartit comme suit :
- Manpower : 42 millions d’euros (dont 28 millions pour Manpower France Holding et 14 pour Manpower France)
- Adecco France : 32,5 millions d’euros
- Adia : 1,7 millions d’euros
- VediorBis : 18,2 millions d’euros