L’Autorité de la concurrence publie l'avis qu'elle a rendu à l’Arcep sur son projet de décision portant sur la levée de la régulation du marché 3b

Arcep

L’essentiel :

L’Arcep a sollicité l’avis de l’Autorité de la concurrence concernant un projet de décision visant à lever la régulation du marché de la fourniture en gros d’accès central en position déterminée à destination du marché de masse (marché 3b). Cet avis, tout comme l’avis n° 23-A-14 du 5 octobre 2023, s’inscrit dans le cadre du septième cycle d’analyse des marchés de gros du haut et très haut débit fixes, prévu pour une période de cinq ans, courant jusqu’à la fin de 2028. Pour rappel, ces avis interviennent à un moment charnière, puisque ce septième cycle est notamment caractérisé par la mise en œuvre du plan de fermeture du réseau cuivre proposé par Orange.

Dans le présent avis, qui porte uniquement sur le marché 3b (offres de gros activées de bitstream), l’Autorité, tout en rappelant l’importance de maintenir une concurrence par les services au sein de ce marché, soutient l’approche de l’Arcep, tant sur la définition des marchés pertinents que sur la justification de la levée de la régulation,. Toutefois, l’Autorité invite l’Arcep à suivre de près les évolutions du marché, compte tenu des enjeux liés à la migration des opérateurs du cuivre vers la fibre.

L'Autorité approuve l'approche de l'Arcep concernant la délimitation matérielle et géographique des marchés pertinents

  • Délimitation matérielle des marchés pertinents

Comme pour les cycles précédents de régulation des marchés de gros du haut et très haut débit fixes, l'Autorité estime qu'il est possible de retenir, comme le propose l'Arcep, l'existence d'une substituabilité entre les offres haut et très haut débit.

Elle réitère toutefois ses observations émises dans le cadre de son avis n° 23-A-14 concernant le caractère imparfait de cette substituabilité, les opérateurs rencontrant certains obstacles pour faire migrer la totalité des clients vers la fibre. En conséquence, l’Autorité invite l’Arcep à observer les évolutions de nature à confirmer ou infirmer cette conclusion, notamment dans le cadre du processus de fermeture à grande échelle du réseau de boucle locale cuivre et à en tirer, le cas échéant, toutes les conséquences.

  • Délimitation géographique des marchés pertinents

Concernant la délimitation géographique des marchés, l’Autorité soutient l’approche de l’Arcep visant à délimiter un marché d’envergure nationale à l’exception des zones très denses, et sans distinction entre les zones d’initiative privée (AMII) et les zones d’initiative publiques, ces deux zones étant portées par une dynamique de convergence.

 

L’Autorité considère comme justifié le projet de l’Arcep de lever la régulation du marché 3b (offres de gros activées de « bitstream »)[1]

  • L’Autorité soutient l’analyse de l’Arcep considérant que le test des trois critères pouvant justifier la régulation du marché 3b n’est pas rempli

Au terme de l’analyse des trois critères prévue par l’article D. 301 du CPCE et précisée par la recommandation de la Commission n° 2020/2245/UE du 18 décembre 2020, l’Arcep conclut que le marché 3b ne remplit  pas, à ce jour, les deux premiers critères et qu’il n’est en conséquence plus justifié de poursuivre la régulation de ce marché.

Dans son avis, l’Autorité relève que l’analyse des deux premiers critères, tenant à l’absence de barrières à l’entrée sur le marché et l’évolution du marché vers une situation de concurrence effective, permet de justifier la levée des mesures de régulation. L’Autorité précise toutefois qu’il conviendra de s’assurer que les opérateurs indépendants, souvent spécialisés sur le marché entreprises, puissent s’appuyer sur des offres de gros accessibles, en particulier sur le segment fibre du marché, dans la mesure où la présence de ces opérateurs contribue à l’animation concurrentielle du marché.

Par ailleurs, l’Autorité note que plusieurs acteurs ont souligné – à rebours de l’analyse de l’Arcep – que les effets attachés à l’image et aux forces de vente d’Orange auprès des clients finaux sont importants, conduisant à une diminution ou une stagnation de leur volume de commandes, alors même que le nombre de clients potentiels s’est accru du fait de la fermeture progressive du réseau cuivre.

Si ces éléments sont susceptibles de tempérer l'analyse de l'Arcep et justifient qu'il soit prêté, au cours du cycle d'analyse, une attention particulière à l'évolution de la situation concurrentielle sur le marché de la fibre, ils ne sont pas de nature à remettre en cause le constat de l'évolution du marché vers une situation du concurrence effective.

  • La nécessité de préserver une concurrence par les services

Comme l’a rappelé l’Autorité dans son avis n° 23‑A‑14 du 5 octobre 2023, la concurrence par les services est cruciale dans le secteur des communications électroniques fixes puisqu’elle a offert un complément utile pour permettre aux opérateurs tiers d’animer la concurrence sur le marché et de progresser dans l’échelle des investissements. Sur ce point, l’Autorité a rappelé, dans l’avis précité, que les offres de gros du marché 3b permettent une présence minimale et progressive de nouveaux concurrents sur l’échelle des investissements grâce à la concurrence par les services.

La fin de la régulation du marché 3b est, dès lors, susceptible de rendre plus difficile l’entrée sur le marché de nouveaux opérateurs en ne garantissant plus la présence de ces offres régulées. Elle est également susceptible d’affecter les opérateurs indépendants spécialisés sur le marché entreprises qui, à la différence de leurs concurrents intégrés verticalement, n’ont d’autre possibilité que de recourir aux offres de gros proposées par d’autres opérateurs pour construire leurs offres de détail. Par ailleurs, la levée de la régulation des offres de gros du marché 3b est susceptible de porter préjudice à ceux d’entre eux qui, bien que ne dépendant pas de ce type d’offres pour l’essentiel de leur activité, y recourent ponctuellement afin de répondre à des appels d’offres dont le cahier des charges exige le recours à des offres activées sans qualité renforcée, parfois fondées sur le réseau cuivre.

Dans le présent avis, l’Autorité précise qu’elle sera particulièrement attentive aux évolutions contractuelles qui interviendront à l’issue de la levée de la régulation notamment en ce qui concerne les prix des offres de gros.

 

 

[1] L’accès bitstream fait référence à la situation dans laquelle l’opérateur propriétaire du réseau installe une liaison d’accès à haut ou très haut débit dans les locaux du client et met ensuite cette liaison d’accès à la disposition de tiers, pour leur permettre de fournir des services à haut ou très haut débit aux clients. En complément de l’accès à la boucle locale, l’opérateur fournit des services de transmission à ses clients et achemine le trafic vers un niveau « supérieur » (ou « d’accès central ») dans la hiérarchie du réseau où les clients de l’offre bitstream ont un point de présence.

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Maxence Lepinoy
Maxence Lepinoy
Chargé de communication, responsable des relations avec les médias
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