Histoire de la concurrence
La politique de concurrence n’a cessé d’évoluer depuis la fin du 19ème siècle à travers le monde. Une histoire indissociable de l’économie telle que nous la connaissons aujourd’hui.
Retour sur les moments qui ont marqué l’histoire de la concurrence et sur quelques grands concepts du droit de la concurrence et leur application en France.
La concurrence en quelques mots
Qu’est-ce que la concurrence ?
La concurrence désigne le processus par lequel les entreprises rivalisent entre elles sur le marché pour satisfaire au mieux les attentes des clients, entreprises comme consommateurs. Cette dynamique peut prendre différentes formes : les entreprises peuvent s’affronter sur le terrain des prix ; elles peuvent aussi tenter de se différencier les unes des autres par l’innovation ou la différenciation des produits (qualité, variété).
La concurrence incite les entreprises à innover en permanence et à améliorer leur productivité, ce qui participe à l’objectif d’une croissance soutenue.
Qu’est-ce que la politique de concurrence ?
Pour assurer que cette lutte entre entreprises se déroule à armes égales et selon les mérites propres de chacun, il est nécessaire de fixer des règles du jeu. Tel est précisément le rôle de la politique de concurrence qui vise à garantir les conditions d’une concurrence libre et non faussée entre les entreprises sur les marchés afin de protéger les intérêts des consommateurs.
En France, l’Autorité de la concurrence, chargée de veiller au maintien d’un terrain de jeu concurrentiel équitable et durable, sanctionne la constitution d’ententes et les abus de position dominante, contrôle - en amont de leur réalisation - les opérations de concentrations et préconise notamment des évolutions législatives et règlementaires aux pouvoirs publics (activité consultative).
10 ans d'action
La genèse du droit de la concurrence et la création d’une Autorité de concurrence
L’ouverture à la concurrence prend ses racines à la Révolution française. La loi Le Chapelier de 1791 interdit ainsi aux membres de la même corporation de se regrouper pour réglementer leurs « intérêts communs ». Vingt ans plus tard, le Code pénal interdit les coalitions pour manipuler les prix « au-dessus ou au-dessous de ce qu’aurait déterminé la concurrence libre et naturelle ». Cette disposition, l’article 419, est restée inscrite dans le Code pénal pendant 176 ans.
Au 19e siècle, les premiers débats émergent également aux États-Unis sur les enjeux de la régulation de la concurrence. À l’heure où les conglomérats se multiplient dans le pétrole, l’acier et la banque, les États-Unis adoptent en 1890 le Sherman Act – aussi connu sous le nom de loi antitrust – qui s’oppose aux pratiques commerciales restreignant la concurrence et interdit à une entreprise détenant un monopole sur un secteur de l’utiliser pour contrôler un autre secteur. Il sera complété en 1914 par le Clayton Act qui régit cette fois les concentrations. C’est le début de la concurrence moderne.
En France, une régulation s'installe progressivement à partir de 1953 (avec la création de la Commission technique des ententes) mais la préoccupation principale reste le contrôle de l'inflation. Ce n'est qu'à partir de 1986 que se met en place une véritable politique de concurrence, à la faveur de l'adoption de l'ordonnance du 1er décembre 1986 qui pose les base de l'économie de marché et met fin à la réglementation des prix et donne naissance au Conseil de la concurrence. En 2008, la loi de modernisation de l'économie (LME) instaure l'Autorité de la concurrence, qui dispose de compétences élargies et succède au Conseil de la concurrence.
25 ans pour construire la concurrence
Institué à cette occasion, le Conseil de la concurrence n’a cessé d’évoluer pour occuper une place centrale dans la régulation des marchés pour devenir l'Autorité de la concurrence.
France et Europe : la concurrence en dates
1953 Publication du Décret du 9 août créant la Commission technique des ententes.
1957 Signature du traité de Rome qui institue la communauté européenne. Le droit de la concurrence y occupe une place majeure : le traité fixe notamment les règles d’une concurrence loyale entre États membres.
1963 La loi du 2 juillet 1963 étend les compétences de la Commission technique des ententes aux abus de position dominante, qui prend le nom de Commission technique des ententes et de positions dominantes.
1977 La Commission technique des ententes et des positions dominantes devient la Commission de la concurrence. Elle conseille le gouvernement sur des questions de concurrence et donne des avis sur les projets et opérations de concentration.
1986 Publication de l’ordonnance sur la liberté des prix et la concurrence. Elle pose les bases du droit français de la concurrence en créant le Conseil de la concurrence, et dote celui-ci de la faculté de sanctionner les pratiques anticoncurrentielles (ententes, abus de position dominante).
2001 Publication de la loi sur les nouvelles régulations économiques (NRE) qui vient renforcer les pouvoirs du Conseil de la concurrence. Le plafond des sanctions pécuniaires est relevé à 10% du chiffre d’affaires mondial des entreprises. De nouvelles procédures, comme la clémence et la non-contestation des griefs, sont mises en place.
2004 Les autorités de concurrence sont tenues d’appliquer directement le droit communautaire (règlement 1/2003). La coopération entre autorités européennes se met en place avec la création du Réseau européen de concurrence.
2009 Naissance de l’Autorité de la concurrence, qui succède au Conseil de la concurrence. La loi de modernisation de l’économie (LME) de 2008 confie à l’Autorité le contrôle des opérations de concentration, qui relevait auparavant du ministère de l’économie. Elle voit ses pouvoirs élargis en matière d’enquête et peut désormais se saisir pour avis de sa propre initiative sur toute question de concurrence.
2015 Promulgation de la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques dite « Loi Macron » qui confie à l’Autorité des missions supplémentaires en matière de régulation des professions réglementées du droit (installation des nouveaux professionnels et tarifs) et introduit la procédure de transaction.
2019 Publication de la directive ECN+ qui dote toutes les autorités de concurrence européennes d'un socle minimal commun de moyens afin de garantir la mise en œuvre plus efficace des règles de concurrence. Après sa transposition en droit français, l’Autorité aura la possibilité d’écarter certaines saisines (opportunité des poursuites) et de s’autosaisir pour prononcer des mesures d’urgence et pourra prononcer des injonctions structurelles dans le cadre de procédures contentieuses.